Le soleil dans le plat (Itij d’i thvaqith)

16 octobre 2015

«Amachahou rebbi ats iselhou Ats ighzif anechth ousarou» (Ecoutez, que je vous conte une histoire, Dieu fasse qu’elle soit belle, longue et se déroule comme un long fil).

Ce n’est qu’en 1969 que le premier homme a posé ses pieds sur la lune. A en croire une légende kabyle, une mémée ayant vécu à une époque remontant à la nuit des temps, a fait mieux que les astronautes de la NASA. Elle a fait tomber dans son écuelle (Thavaqith is) la lune (ayour) pour faire des sortilèges. Encouragée par ce premier exploit, elle s’est attaquée ensuite au soleil (itij), mal lui en prit. Si l’opération de descente de la lune s’est passée sans incident, ce n’était pas le cas lors de la descente du soleil où soudainement le jour s’est transformé en nuit.

Ce jour-là, elle a pris sa faucille (Amg’er) et a commencé à battre frénétiquement de l’eau versée dans un grand plat. L’émulsion produit des bulles, qui montent vers le ciel en myriades. La quantité produite est tellement considérable qu’en quelques instants le soleil est obscurci. Il rapétisse, rapétisse, jusqu’à devenir une petite boule qui tombe dans le plat de la vieille. Privés de la clarté du jour, les ténèbres s’emparent du monde, les premiers êtres humains qui ont assisté au phénomène sont affolés.

Ils courent dans tous les sens car surpris. Ceux qui connaissent les dons de sorcière de la vieille, viennent la voir et lui demandent d’utiliser ses pouvoirs magiques pour remettre le soleil à sa place. Elle essaye mais en vain. Les gens se rassemblent autour d’elle, la soupçonnant, ils se font de plus en plus menaçants. Ils s’approchent d’elle, torches à la main pour la brûler vive dans sa chaumière, afin, que peut-être le soleil reprenne sa place. Apeurée, sentant sa mort proche, elle invoque Dieu :

“Oh ya rebbi aâzizen

Ghelt’agh elghelt’a moqren

Itij illan d’eg g’enni

id itsaken t’ia imedden

Sah’argas-s ighlid d’ayen

Vghan ay inghen elghachi”

(Oh, mon Dieu !

J’ai fait une grande erreur

Le soleil qui était aux cieux

Qui donnait la clarté

Je l’ai fait tomber

Les gens veulent me tuer)

Dieu, courroucé, lui dit :

“It’ij our itsoughal s-ig’enni

Ama ouzlen id’amen

id’ame memmi-m aâzizen”

(Le soleil ne retournera au ciel,

qu’après que tu aies sacrifié ton fils bien-aimé.)

“C’est le prix à payer.”

Acculée la vieille souricière accepte le sacrifice demandé. Ce fut-là, le premier sacrifice humain du monde. Une fois l’enfant sacrifié, le soleil reprend sa place dans le ciel et brille, depuis, au firmament.

Ce sacrifice a eu un effet dissuasif sur toutes les sorcières à venir, si l’envie de faire tomber le soleil ou la lune dans leurs écuelles leur prend. Elles réfléchiront à deux fois, car automatiquement elles perdront leurs enfants.

La menace divine ayant porté ses fruits, aucune sorcière n’a pu faire descendre sur terre, ni le soleil ni la lune. Les plus hardies ne réussissent qu’à provoquer cycliquement des éclipses (Afsakh G-itij) sans aucune conséquence sur les êtres vivants sur terre. Heureusement pour nous.

Our kefount eth h’oudjay inou our kefoun ir den ts emz’ine as n-elaid an en etch ak’ soum ts h’emz’ ine ama n g’a thiouenz’ iz’ ine».

(Mes contes ne se terminent comme ne se terminent l’orge et le blé. Le jour de l’Aïd, nous mangerons de la viande et des pâtes, jusqu’à avoir des pommettes rouges et saillantes).

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